StructuralStigma

Stigmatisation structurelle : l’obstacle invisible à des soins de santé équitables

La plupart des Canadiens connaissent les derniers moments bouleversants de la vie de Joyce Echaquan. Admise dans un hôpital du Québec, les graves douleurs d’estomac dont elle souffrait ont été diagnostiquées à tort comme étant des signes de sevrage aux opioïdes. Dans cet hôpital, Mme Echaquan a été immobilisée, a dû prendre des médicaments contre-indiqués à ses problèmes de santé préexistants et a dû subir les commentaires insultants et moqueurs d’une infirmière et d’un préposé aux soins.

Une enquête sur l’incident a révélé qu’il existait entre les patients autochtones et le personnel de l’hôpital un schéma de méfiance mutuelle. Joyce Echaquan avait hésité à se rendre à cet hôpital en raison des mauvais traitements reçus par le passé et il s’est avéré, malheureusement, que ses inquiétudes étaient bien fondées.

La mort tragique de Mme Echaquan est aujourd’hui largement considérée comme un signal d’alarme qui démontre la nécessité d’agir pour lutter contre le racisme systémique et la stigmatisation structurelle présents dans le système de santé canadien.

COMPRENDRE LA STIGMATISATION STRUCTURELLE

SoinsSantéCAN collabore avec la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) pour lutter contre la stigmatisation structurelle, favoriser les pratiques axées sur le rétablissement et améliorer l’accès à des soins de santé mentale de qualité partout au Canada.
Ensemble, les deux organisations codirigent le Réseau de soins de santé mentale de qualité (RSSMQ), un réseau pancanadien rassemblant des chefs de file du secteur de la santé cherchant à favoriser les pratiques axées sur le rétablissement et la promotion de la santé et de la sécurité psychologiques au sein des établissements de soins de santé. SoinsSantéCAN est également membre du comité consultatif du Comité de planification pour l’élaboration d’un module de formation sur la stigmatisation structurelle de la CSMC.

Les préjugés implicites et explicites des prestataires de soins de santé et des lois, politiques ou pratiques en vigueur au niveau organisationnel peuvent donner lieu à une discrimination à l’encontre des personnes qui vivent ou ont vécu des problèmes de santé mentale et d’usage de substances. Les personnes ayant un vécu expérientiel sont particulièrement touchés par la stigmatisation structurelle.

Depuis 2019, la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) s’efforce de mieux comprendre les problèmes causés par la stigmatisation structurelle dans les soins de santé chez les personnes ayant un vécu expérientiel. La CSMC a effectué une analyse documentaire complète, qui identifie deux impacts significatifs de la stigmatisation structurelle – un accès limité aux soins dû à une répartition inéquitable des ressources ou à des services inadéquats, et une qualité de soins inférieure. La CSMC a tenté de remédier à ces failles en identifiant les principaux domaines de changement structurel en utilisant une variété d’outils, tels qu’un cadre d’action et des méthodes de mesures servant à faire un état des lieux et évaluer les situations existantes au sein des organisations de soins de santé.

La CSMC élabore des modules de formation pour aider à reconnaitre, comprendre et lutter contre la stigmatisation structurelle. A titre de membre du comité de planification sur la stigmatisation structurelle, SoinsSantéCAN apporte des conseils stratégiques sur :

  • les enjeux prioritaires et les stratégies d’engagement liés à la lutte contre la stigmatisation structurelle liée à la maladie mentale et à la consommation de substances dans les environnements de soins de santé ;
  • le contenu, la durée, le public cible, les objectifs d’apprentissage et les exigences d’accréditation des modules de formation, et ;
  • les efforts de mise en oeuvre et d’échange de connaissances nécessaires à la diffusion et la mise en pratique des modules de formation.

Les modules de formation s’adressent aux responsables de la santé, aux prestataires et aux personnes ayant un vécu expérientiel, et couvrent quatre domaines d’action :

  1. Expliquer la stigmatisation structurelle et son impact sur les personnes ayant des problèmes de santé mentale ou d’usage de substances
  2. Exposer les circonstances et contextes de soins de santé où se manifeste la stigmatisation structurelle liée aux personnes souffrant de troubles mentaux ou d’usage de substances
  3. Définir ce que le concept de stigmatisation structurelle liée aux problèmes de santé mentale ou d’usage de substances signifie pour vous.
  4. Réfléchir aux moyens de mettre fin à la stigmatisation structurelle.

Chaque module comprend un contenu de formation, des composants interactifs, des études de cas, des vidéos de personnes ayant un vécu expérientiel, de prestataires de soins de santé et d’experts, ainsi que des ressources.

AUTRES RESSOURCES TRAITANT DE LA STIGMATISATION STRUCTURELLE

SoinsSantéCAN a dirigé l’élaboration du Cadre de soins de santé mentale de qualité, une initiative clé du RSSMQ, permettant d’identifier et de définir quels sont les soins de santé mentale de qualité et les 10 critères qualitatifs essentiels en terme de prestation de soins.

La stigmatisation structurelle est abordée dans le critère de qualité sans stigmatisation et inclusive, éclairé par les avis de professionnels de la santé à travers le Canada et de personnes ayant un vécu expérientiel. Des soins de santé mentale de qualité doivent s’attaquer aux « facteurs de stigmatisation liée à la santé mentale et aux pratiques de stigmatisation dans les soins de santé mentale ». Dans ce critère on souligne la nécessité d’agir à tous les niveaux de stigmatisation (individuelle, interpersonnelle, intersectorielle et structurelle) pour « mieux soutenir les personnes qui ont été victimes de stigmatisation et de discrimination. » Les personnes qui demandent des soins doivent toujours se sentir « respectées et valorisées ».

La CSMC et les membres du réseau continuent de mettre en oeuvre les prochaines étapes de mise en pratique du Cadre.
Un article rédigé par SoinsSantéCAN sur l’élaboration du cadre a récemment été publié dans le Healthcare Management Forum, une revue à comité de lecture.