Par : Paul-Émile Cloutier
La pandémie de COVID-19 a clairement mis en évidence les lacunes et les carences de notre système de santé. Ne pas tirer les leçons de cette crise serait un manquement au devoir, en particulier envers ceux qui ont perdu la vie en raison du virus.
La crise de COVID-19 a révélé de graves défaillances dans le système de soins de santé du Canada, déjà à la traine avant l’arrivée de la pandémie au mois de janvier.
La COVID-19 passant de l’offensive à un siège rythmé par des poussées et des vagues qui devraient s’aggraver à l’automne, ne nous accorde que très peu de temps pour passer aux actes – notamment à ceux de notre Loi canadienne sur la santé. En tant que nation, nous célébrons la Loi canadienne sur la santé comme une caractéristique déterminante de notre citoyenneté, mais nous continuons d’élire des gouvernements qui ne semblent pas intéressés à lui accorder sa juste valeur.
Au lieu de cela, les querelles de procédures entre les gouvernements provinciaux et territoriaux d’un côté et le gouvernement fédéral de l’autre ont, pendant trop longtemps, supplanté les sérieuses discussions sur la stratégie à mettre en place pour améliorer la santé de tous les Canadiens. Il est plus que temps pour nos politiciens de prendre les mesures qui s’imposent pour assurer un système de soins de santé du XXIe siècle, efficace, connecté et capable de répondre aux besoins de la population croissante et vieillissante de notre pays et aux crises telles que les pandémies.
Alors que nous continuons notre bataille contre la COVID-19, nous devons revoir de façon radicale et urgente la réponse nationale apportée à la pandémie. Tout comme le SRAS en 2003, la COVID-19 a profondément bouleversé les fondements de notre système de soins de santé. Elle a révélé la fragilité de notre système et les failles de notre politique nationale en termes de surveillance, de gestion, d’information et de contrôle des infections.
Nous comptons sur la recherche en santé en temps de crise sanitaire, mais continuons de la sous-financer. Nous nous appuyons sur les hôpitaux, les centres de soins de longue durée et autres établissements de santé, mais nous leur refusons les fonds nécessaires pour garantir leur modernisation et leur capacité à répondre aux nouvelles menaces pesant sur la santé. Les couloirs des hôpitaux regorgent de patients car nos programmes ne financent pas suffisamment les soins à domicile ou en milieu communautaire pour assurer leur qualité et leur rentabilité.
La COVID-19 a clairement prouvé que le gouvernement fédéral devait financer davantage le système de santé canadien. Il ne doit plus le laisser à la traine et compter sur le dévouement des personnels de première ligne pour pallier les ressources insuffisantes. Nous ne pouvons accepter que les résidents des établissements de soins de longue durée soient logés à quatre dans une chambre. Nous ne pouvons plus tolérer qu’un employé soit moins bien rémunéré lorsqu’il prodigue des soins à domicile.
Une décision positive fut l’annonce récente faite par la ministre fédérale de l’Infrastructure, Catherine McKenna, qui donne accès aux hôpitaux au nouveau fonds fédéral de 3 milliards de dollars accordé aux infrastructures. Pendant trop longtemps, les établissements de soins de santé étaient exclus des subventions fédérales en raison d’un discours politique qui considère à tort que «la santé est du ressort des provinces ». La santé est une affaire de patient. Nous ne pouvons pas laisser les querelles juridictionnelles compromettre les progrès accomplis pour assurer un système de santé plus efficace, mieux connecté et d’ampleur nationale.
La COVID-19 a clairement démontré que les gouvernements fédéral et provinciaux / territoriaux doivent rassembler et partager efficacement leurs données s’ils souhaitent être mieux informés en période d’épidémie. En adoptant les stratégies du numérique en santé, nous pouvons améliorer la surveillance d’épidémies telles que la COVID-19, mais aussi la surveillance de maladies infectieuses à transmission vectorielle exacerbées par le changement climatique, telles que la maladie de Lyme ou le virus du Nil occidental. Il en est de même pour les technologies à distance favorisant les soins virtuels, mais nous devons en faire plus.
La pandémie de COVID-19 a clairement mis en évidence les lacunes et les carences de notre système de santé. Ne pas tirer les leçons de cette crise serait un manquement au devoir, en particulier envers ceux qui ont perdu la vie en raison du virus.
Nous ne pouvons plus envisager notre avenir avec hésitation. Alors que nous continuons la bataille contre la COVID-19, les dirigeants politiques du Canada doivent prendre conscience de leurs échecs.
Une commission fédérale doit être constituée pour effectuer un examen approfondi de la situation. Les premiers ministres du Canada doivent ensuite discuter honnêtement et ouvertement des résultats de cet examen et de la mise en place d’un système de soins de santé pancanadien au lieu de 13 systèmes distincts fonctionnant en vase clos. La Loi canadienne sur la santé a fourni un cadre et il est possible que ce cadre soit toujours approprié. Ce qui ne l’est pas, c’est d’espérer que les choses s’amélioreront sans un leadership politique et collaboratif à tous les niveaux.
Paul-Émile Cloutier est Président et chef de la direction SoinsSantéCAN, le porte-parole national des organisations de soins de santé et des hôpitaux des quatre coins du Canada.