Mémoire présenté au Comité permanent de la science et de la recherche : Étude sur les programmes des bourses d’études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada

INTRODUCTION

SoinsSantéCAN est le porte-parole national des instituts de recherche en santé, des hôpitaux et des organisations de soins de santé de tout le Canada. Nous plaidons en faveur de la recherche et de l’innovation en santé et d’un meilleur accès à des services de santé de grande qualité pour la population canadienne, et nous donnons aux professionnels de la santé les moyens d’agir en leur offrant des programmes de formation de premier plan. Nous sommes heureux de cette occasion de présenter notre mémoire au Comité permanent de la science et de la recherche dans le cadre de son étude sur les programmes des bourses d’études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada.

La recherche et l’innovation en santé favorisent une amélioration des résultats en santé et la transformation du système de santé tout en jouant un rôle crucial pour aider le Canada à relever les défis médicaux et les défis du système de santé. Les investissements passés dans des domaines comme la génétique, la médecine et la recherche personnalisée en santé ont amélioré notre compréhension et notre capacité de diagnostiquer et de traiter aujourd’hui des maladies comme le cancer. De plus, la recherche sur les déterminants socioéconomiques de la santé a favorisé la transformation du système de santé et a contribué à l’amélioration des résultats en santé chez les personnes mal desservies. Au final, ces progrès scientifiques ont permis d’améliorer les résultats en santé des Canadiens tout en améliorant la qualité des soins et l’utilisation efficace des ressources des soins de santé.

Les étudiants des cycles supérieurs et les stagiaires postdoctoraux jouent un rôle important au sein des équipes de recherche et sont essentiels pour la recherche et l’innovation canadiennes. Comme pays, nous devons faire davantage pour soutenir leurs études, leur formation et leur développement; nous devons nous assurer que la prochaine génération de chercheurs reflète la diversité du Canada; et nous devons faire en sorte que la carrière en recherche au Canada soit attrayante et viable.

Le présent mémoire présente une réflexion et des recommandations sur les programmes de bourses d’études supérieures et postdoctorales offertes par le gouvernement fédéral, ainsi que la structure de financement élargie pour les étudiants des cycles supérieurs et les stagiaires postdoctoraux qui effectuent de la recherche au Canada.

RECOMMANDATIONS

Recommandation 1 : Augmenter le financement fédéral des bourses d’études supérieures et postdoctorales offertes par l’intermédiaire des trois conseils subventionnaires et les lier à la hausse de l’inflation ou du coût de la vie.

Selon le Rapport du comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche publié récemment, la valeur des bourses d’études et de recherche accordées par l’intermédiaire des trois conseils subventionnaires n’a pas augmenté depuis 2003[i]. Avec la hausse du coût de la vie et des frais de scolarité, de nombreux étudiants des cycles supérieurs et stagiaires postdoctoraux vivent dans la pauvreté[ii]. Or, ils sont des membres essentiels des équipes de recherche qui effectuent un travail important et ils doivent être rémunérés en conséquence.

Il est suggéré de normaliser toutes les bourses fédérales des trois conseils et de les porter à un minimum de 25 000 $ pour les étudiants à la maîtrise et à 35 000 $ pour les doctorants, ce qui assurerait un soutien financier équitable dans toutes les disciplines.

Une telle augmentation contribuera à assurer des salaires décents aux étudiants des cycles supérieurs et aux stagiaires postdoctoraux, ce qui aura pour effet de réduire leur charge financière au moment d’entamer une carrière dans la recherche au Canada. Cette augmentation favorisera également l’inclusion et la diversité dans le domaine, car il existe actuellement des inégalités dans la capacité financière de poursuivre des études et une carrière dans la recherche. Un personnel de recherche qui reflète la diversité du Canada est un personnel plus fort, car la variété des expériences et des points de vue enrichit la qualité des travaux de recherche du Canada.

En augmentant le financement fédéral pour les étudiants, le gouvernement fédéral peut également jouer un rôle important en rendant les études supérieures et la carrière en recherche plus accessibles et plus attrayantes pour un plus grand éventail de personnes. Actuellement, en raison des coûts élevés, seules les personnes qui en ont les moyens financiers peuvent mener une carrière dans la recherche. De plus, comme d’autres pays offrent de meilleures possibilités de financement, de nombreux Canadiens et chercheurs formés au Canada – dont plusieurs sont endettés après leurs études – quittent le pays pour mener leurs recherches à l’étranger, là où il est financièrement viable de le faire.

Un soutien accru aux bourses d’études permettra de répondre aux préoccupations des étudiants à court et à long terme, en plus de favoriser la prospérité future du Canada. L’augmentation de la valeur des bourses d’études et de recherche réduira les obstacles à l’accès aux études et à la carrière dans le domaine de la recherche, attirera et retiendra les personnes talentueuses et encouragera la diversité et l’inclusivité au sein de l’écosystème de la recherche.

Recommandation 2 : Augmenter le nombre de bourses d’études et de recherche offertes par l’intermédiaire des trois conseils subventionnaires.

Une étude récente intitulée Analysis of financial challenges faced by graduate students in Canada[iii], a révélé que malgré le fait que le nombre d’étudiants des cycles supérieurs ait doublé au cours des vingt dernières années, le nombre de bourses offertes par l’intermédiaire des trois conseils subventionnaires a diminué[iv]. Le rapport conclut en recommandant que le nombre de bourses offertes par l’intermédiaire des trois conseils augmente de 50 %. Nous suggérons quant à nous que le nombre de bourses soit rajusté tous les ans pour tenir compte du niveau d’inscriptions dans les programmes d’études supérieures.

L’augmentation du nombre de bourses offertes permettra à un plus grand nombre d’étudiants d’obtenir du financement, ce qui rendra les études, la formation et la carrière dans le domaine de la recherche plus accessibles et plus attrayantes. Le Canada ne pourra qu’en sortir gagnant alors qu’il poursuit sa transition vers une économie fondée sur le savoir, et que les compétences des scientifiques capables de résoudre les problèmes les plus urgents de la planète sont de plus en plus appréciées.

De même, l’augmentation du nombre de bourses fédérales contribuera à réduire le fardeau financier des superviseurs et des chercheurs principaux qui dépendent des subventions obtenues pour rémunérer les étudiants de leurs équipes. Les superviseurs pourront parfois utiliser une partie des économies ainsi réalisées pour compléter le soutien financier que reçoivent les étudiants, ce qui améliorera davantage leur situation financière.

Recommandation 3 : Doubler le financement actuel des trois conseils subventionnaires et s’engager à une augmentation annuelle qui suit le rythme de l’inflation et des références mondiales.

La récente étude intitulée Analysis of financial challenges faced by graduate students in Canada a révélé que la plupart des étudiants – 67 % – sont financés par les subventions reçues par leurs superviseurs[v]. Ces données concordent avec l’expérience des membres de SoinsSantéCAN qui sont des chercheurs et des chercheurs principaux (c.-à-d., des superviseurs) dans des instituts de recherche, des hôpitaux et des autorités sanitaires de la grandeur du pays.

Les bourses attribuées par l’intermédiaire des trois conseils subventionnaires doivent couvrir la recherche, ainsi que les coûts reliés à la recherche, y compris les salaires du personnel et des étudiants. Malgré les investissements des dernières années, les budgets des trois conseils n’ont pas suivi le rythme du financement offert dans d’autres pays. Le Canada est à la traîne dans la proportion de la dépense totale en santé allouée à la recherche qui s’établit à 1,5 % alors qu’elle est de 3,3 % en Australie et de 5,9 % aux États-Unis[vi]. Lorsqu’on examine la dépense totale en recherche et développement dans tous les secteurs, le Canada est le seul pays de l’OCDE dans lequel l’investissement en R-D a diminué de façon constante au cours des 20 dernières années[vii]. En 2019, la dernière année pour laquelle on dispose de données comparables, le Canada a investi 1,76 % de son PIB total dans la recherche, alors ce pourcentage s’établit à 1,79 % en Australie, à 2,71 % au Royaume-Uni et à 3,17 % aux États-Unis. La moyenne de l’OCDE a été de 2,56[viii].

Ce défaut du Canada de suivre le rythme de ses pairs a des incidences sur les étudiants. Alors que le coût de la vie et les frais de scolarité augmentent, les superviseurs font face à une diminution de la valeur de leurs subventions, de sorte qu’ils ont moins d’argent pour couvrir les mêmes coûts croissants de la recherche. Les étudiants sont touchés parce que même si leurs allocations restent constantes, leur valeur diminue. Comme les coûts continuent d’augmenter, à défaut d’une augmentation du financement des trois conseils, les études et la carrière en recherche au Canada deviennent moins accessibles et moins attrayantes pour la prochaine génération de chercheurs talentueux.

Il est essentiel de veiller à ce que le financement durable de la recherche soit accessible et puisse répondre efficacement aux besoins évolutifs de la communauté de la recherche tout en renforçant la compétitivité des chercheurs canadiens sur la scène mondiale. En doublant le financement actuel aux trois conseils subventionnaires et en s’engageant à une augmentation annuelle qui tient compte de l’inflation et suit le rythme des références internationales, les chercheurs pourront disposer des ressources nécessaires pour mener des projets innovants, le Canada pourra attirer et retenir la prochaine génération des meilleurs talents et le Canada pourra stimuler des découvertes percutantes dont profitera la société dans son ensemble.

À PROPOS DE SOINSSANTÉCAN

SoinsSantéCAN est le porte-parole national des instituts de recherche en santé, des hôpitaux et des organisations de soins de santé du Canada. Nos membres font partie des plus de 1 200 établissements de soins de santé qui soutiennent plus de deux millions d’emplois directs et indirects, représentent près de 12 % du PIB du Canada et stimulent les économies locales par la recherche et le développement, la commercialisation des découvertes et les projets d’infrastructures.

Nos membres proviennent de diverses organisations, notamment des instituts de recherche, des hôpitaux, des prestataires de soins de longue durée et de soins à domicile, des autorités sanitaires et des associations du secteur de la santé.

Ces organisations jouent un rôle crucial pour permettre de mieux comprendre les maladies, de mettre au point des traitements pour les patients, de fournir de soins de grande qualité et de résoudre les problèmes les plus pressants auxquels le Canada est confronté.

RÉFÉRENCES

[i] Frédéric Bouchard, Yolande Chan, Gilles Patry, Janet Rossant, Laurel Schafer, Baljit Singh et Vianne Timmons. 2023. Rapport du comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche : https://ised-isde.canada.ca/site/panel-federal-research-support/sites/default/files/attachments/2023/Comite-consultatif-recherche-2023.pdf.

[ii] Sarah Jane Laframboise, Thomas Bailey, Anh-Thu Dang, Mercedes Rose, Zier Zhou, Matthew D. Berg, Stephen Holland, Sami Aftab Abdul, Kaela O’Connor, Sara El-Sahli, Dominique M. Boucher, Garrett Fairman, Jacky Deng, Katherine Shaw, Nathaniel Noblett, Alexa D’Addario, Madelaine Empey et Keaton Sinclair. 2023. Analysis of financial challenges faced by graduate students in Canada. Biochimie et biologie cellulaire. e-First  https://doi.org/10.1139/bcb-2023-0021.

[iii] Ibid.

[iv] Ibid.

[v] Ibid.

[vi] Institut canadien d’information sur la santé. 2020. Tendances des dépenses nationales de santé. Récupéré de : https://www.cihi.ca/sites/default/files/document/nhex-trends-2020-narrative-report-fr.pdf; Australian Institute of Health and Welfare. 2021. Health expenditures Australia 2019-20. Récupéré de : https://www.aihw.gov.au/getmedia/f1284c51-e5b7-4059-a9e3-c6fe061fecdc/Health-expenditure-Australia-2019-20.pdf.aspx?inline=true#:~:text=Using%20the%20current%20estimates%2C%20the,on%20research%20(Figure%2011; Research America. 2020. U.S. Investments in Medical and Health Research and Development. Récupéré de : https://www.researchamerica.org/wp-content/uploads/2022/07/ResearchAmerica-Investment-Report.Final_.January-2022.pdf.

[vii] Données de l’OCDE. 2021. Dépenses intérieures brutes de R-D. Récupéré de : https://data.oecd.org/fr/rd/depenses-interieures-brutes-de-r-d.htm.

[viii] Ibid.